Combien de moi
Te prie de partir
Combien de moi
A cédé
À la genèse de la nuit
Aux cendres de la mer
Combien de moi
S’est abandonné
À la fuite du rêve
S’est fait noyer
À la surprise de la poésie
Combien de moi
Ratisse
Le marteau d’un pied
Sur des frontières
Cristallisées
Et avale
Les malles du pays
Combien de moi
Combien de moi
Dans le cratère de la serrure
Sondant
Le clapotis d’Éros
Combien de moi
Des ténèbres épuisées
Me jette en étincelles
Vagabond du souvenir… Que je suis
Je ne retournerai plus
Au lit de mon oubli
De mes artères
De mes cartographies ignées
Je ne retournerai plus
Mon train, un hérisson
Maudissant le départ
Et le soir, un grillon
Rôdant
Autour d’une tresse de femme
… En laine
Je ne retournerai plus
Au fuseau de mes jours
… Taciturne
Te tissant les lettres
De soleil et d’éclipse
Je ne retournerai plus
Et mon chagrin farouche
Crépite au creux du vent
Et hennit son vacuum
Au fond de la vallée
Je ne retournerai plus à tes chaînes
et les miennes
Saurais-je revenir
Alors que mon désir fauve
N’attend plus le soir
Pour illuminer les étoiles
Et se suicider
Saurais-je revenir
Alors que de ma taille
Une volée de colombes
Se penche vers le sud
Après avoir niché dans la glace
Et apostasié
…
Une femme triste
Dans le périanthe du moi
Caresse une aiguille
Et crève ses jours
Saurais-je revenir
Vers le visage de mon ancêtre
Habité de mercure
Vers son habit
Brodé du souffle des dunes
Saurais-je revenir
Ondoyer comme des souvenirs
Sur les boulevards pubères
Saurais-je revenir
Saurais-je revenir
Accroché à la potence d’un exil
Réduite en miettes
Dans l’impasse de la nostalgie
…
À quand serai-je de retour
Et le solfège de mes soupirs
…Un souvenir
À quand serai-je de retour
Et mon âne, fatigué
Par les chagrins de l’automne
…
Je reviendrai
Je reviendrai
Couché sur le sol d’un cachot
Comme une semence interdite
De l’exil vers l’exil
Je reviendrai mourir à l’aube
Tisser ma mort en flocons de poussière
…
Je reviendrai ravaler les blessures de la mer
Moi, débris de la barque d’Ulysse
Paris, 2009